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Blog d'une Serial Reader
22 octobre 2011

Jonathan Trigell, Jeux d'enfants

9782070379651FS « Celui qui ne peut pardonner aux autres se coupe des ponts qu'il devra traverser, car tout homme éprouve le besoin de se faire pardonner. » (Thomas Fuller)

Quatrième de couverture :

Qui est Jack ? Qui est ce jeune homme accompagné d'un tuteur jouant les pères adoptifs ? Qui est cet adolescent mal dégrossi au comportement infantile, parfois touchant de maladresse, qui semble découvrir un monde qui lui fait peur et lui est résolument hostile ? Que cherche-t-il à cacher et pourquoi vit-il sous une fausse identité alors que les tabloïds anglais traquent « un monstre » ? La rédemption est-elle possible lorsque l'irréparable a été commis ? Comment trouver une place lorsque l'on est devenu la bête noire d'une société vindicative et puritaine nourrissant les tueurs nécessaires à sa soif de sang ?...

*****

Si il y a bien une chose que je peux vous dire, c'est que j'avais vraiment très envie de lire ce livre ! Et évidemment, alors que je l'avais vu à la Fnac des tas de fois, une fois que j'ai voulu l'acheter, ayant soudain un besoin impératif de le lire, plus moyen de le trouver ! Après des mois de recherches infructueuses, je me suis donc décidée à recourir à l'achat en ligne, que je vais à présent avoir bien du mal à laisser tomber. Si je ne l'avais jamais fait avant, c'est que j'étais persuadée que, ne serait-ce qu'avec les frais de port, ça allait me revenir bien plus cher. Que nenni ! Sur Amazon, non seulement le prix de départ est le prix français, moins élevé que le prix belge, mais en plus le site pratique toujours une petite réduction supplémentaire. Et cerise sur le gâteau, si on fait livrer son colis à un point Kiala et non à domicile, il n'y a aucun frais de livraison. Elle est pas belle la vie ? C'est donc toute contente d'avoir fait cette découverte bénéfique pour mon portefeuille que j'ai entamé cette lecture tant attendue.

Et bien sûr, à force d'avoir tant attendu ce livre, j'ai été un chouïa déçue. En fait, je n'ai pas forcément appris quoi que ce soit que je ne savais déjà, je n'ai pas été surprise. En gros je savais de quoi parlait le livre, et ma foi à peu de chose près ça s'est limité à ça.

Ce qui ne m'a pas empêchée d'apprécier ma lecture et le thème abordé. J'ai été touchée par le personnage de Jack, emprisonné très jeune pour le meurtre d'une fillette de dix ans, et qui sort de prison à 24 ans en ayant aucune expérience de la vie réelle et qui va devoir apprendre à vivre normalement, essayant de cacher son inexpérience, se créant une autre identité, un autre passé. On compatis avec lui, parce que, malgré le meurtre qu'il a commis il nous est sympathique et c'était il y a tellement longtemps qu'il mérite bien une seconde chance. Pourtant, le peuple britannique n'a pas l'air d'être d'accord avec ça et ne rêve que de lui faire la peau, c'est pourquoi Jack part habiter dans une nouvelle ville, loin de « chez lui », et prend une nouvelle identité, sous la protection de « son oncle Terry ».

Alors ça soulève évidemment ce débat par rapport aux enfants meurtriers : avaient-ils conscience de ce qu'ils faisaient ? Faut-il leur octroyer une seconde chance, ou les condamner à jamais car ce sont de vrais démons, des graines de psychopathes serial killer ? Bien sûr, il n'y a pas de bonne réponse, tout dépend des cas. Je pense qu'il arrive que certains soient véritablement mauvais et que ça ne soit que le début d'une vie de crime et de malfaisance, mais je pense aussi que la plupart méritent bel et bien une seconde chance. Si on prend Jack et son ami, je pense qu'ils avaient des circonstances atténuantes : A n'a jamais eu d'amis, a toujours été rejeté et tabassé par les autres, et n'a sans doute jamais dû ressentir beaucoup de réelle affection de la part de son père, qui a toujours cru qu'il n'était pas son fils ; B quant à lui, garçon un peu étrange, n'a pas d'amis non plus et se fait abusé par son grand frère. Quand Jack rencontre B, pour la première fois il se sent plus fort et ça lui fait du bien. Finalement je me dis que ce meurtre était prévisible, parce que si ça n'avait pas été cette fille, ça aurait été une bagarre qui aurait mal tourné, où ils auraient frappé trop fort, ayant pour une fois le dessus. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé et ce qui me choque le plus c'est la diabolisation que le peuple britannique a fait de ces enfants, malgré le fait qu'ils n'aient jamais raconté ce qui s'était vraiment passé. En partie parce que la victime est une jolie petite fille modèle et qu'eux – et particulièrement Jack – sont laids, on en fait des monstres qu'on est prêt à traquer même des années plus tard une fois leur peine purgée. Alors que la vérité est tout autre. Car ce « petit ange » qu'ils ont tué n'était peut-être pas si angélique que ça, même si elle ne méritait pas d'être tuée pour autant. A et B ont vu quelque chose qui les a troublé, et qui l'a troublée elle-aussi, et elle a fait preuve de rudesse et d'insolence à leur égard à un moment qui, bien que légitime, était mal choisi. La combinaison des deux a suffit pour qu'advienne le pire, voilà tout. Mais le peuple et la presse, ne connaissant pas la vérité et si prompts à juger, ne seraient de toute façon pas prêts à pardonner. Malgré tout, qu'ils refusent après tant d'années de laisser Jack vivre sa vie me sidère.

Et pourtant, je ne peux pas vraiment les en blâmer totalement. Je ne comprends certes pas qu'ils ne le laissent pas tranquille : il est censé mener une nouvelle vie sous une nouvelle identité, personne n'est censé savoir qui il est – franchement, qu'on lui lâche la grappe ! Toutefois, dans l'optique où ses voisins, ses collègues, sa petite-amie découvrent qui il est vraiment, comment devraient-ils réagir ? Comment nous-même réagirions-nous ? C'est facile de dire qu'il faut leur laisser une seconde chance, mais si nous-même étions concernés par sa présence que ferions-nous ? Ne nous sentirions-nous pas menacés ? On a déjà vu tellement de psychopathes qui avaient pourtant l'air tellement gentils, serviables et inoffensifs... Mais imaginons-nous maintenant dans la situation inverse : tout le monde pourrait être amené un jour à faire une grosse bêtise. Ne voudrions-nous pas avoir une seconde chance dans ce cas ? Et si en plus cette bêtise avait été commise dans notre enfance et que nous soyons resté tant d'années en prison, les années les plus importantes de toutes ? Ou s'il s'agissait de nos enfants ? Bref, un sujet vaste et complexe à méditer !

Pour revenir au livre, là où j'ai été le plus déçue c'est la fin. Le pire c'est que d'une certaine façon elle m'a plu, parce qu'elle montre bien que Jack est un être fragile et qu'il a peur. Mais du point de vue de l'auteur je trouve que c'est un peu trop facile comme fin. En gros quand une autre partie de l'histoire s'apprête à commencer, l'auteur choisi d'y mette fin, et je ne sais pas trop quoi en penser.

Un livre malgré tout agréable et touchant et qui surtout fait réfléchir.

*****

Quid de l’adaptation cinématographique ?134123-b-boy-a

Adaptation réalisée en 2007 par John Crowley, avec Andrew Garfield, Peter Mullan, Katie Lyons, Shaun Evans, Siobhan Finneran et Antony Lewis. Durée : 1h40.

Bande-annonce ici

Avec Boy A, John Crowley nous offre une adaptation plus que fidèle du roman de Jonathan Trigell – de ce point de vue-là il n'y a rien à redire ! Rien à redire non plus sur la distribution, le fantastique Andrew Garfield en tête, nous offrant un Jack Burridge émouvant et terriblement humain et dont l'interprétation sublime non seulement le film mais l'histoire toute entière. Garfield qui confirme l'excellente impression que j'avais de lui depuis sa non moins superbe prestation dans Never let go et qui le fait sans doute figurer parmi les meilleurs acteurs de sa génération.

Une adaptation fidèle donc, où j'aurais pu me heurter aux mêmes soucis que lors de ma lecture. Si ce n'est qu'il s'est passé une ou deux semaines depuis ma lecture, semaines durant lesquelles j'ai continué à y réfléchir, et cette réflexion combinée au visionnage du film m'a fait comprendre que finalement cette histoire se situe au-dessus de la question de la culpabilité de Jack. Jonathan Trigell n'a pas écrit un livre polémique sur les enfants criminels et leur culpabilité – cette question, ce débat, il le laisse aux lecteurs qui en seront seuls juges. Une fois qu'on a compris et accepté ça il suffit de se laisser porter par Jack et ses émotions. Et alors on se rend comte que la fin imaginée par Trigell est la meilleure possible si on ne veut pas finir par rentrer dans ce débat. Bref, tout ça pour dire que j'ai une meilleure impression maintenant et que je me suis peut-être montrée un peu dure. Mea culpa.

*****

Jonathan Trigell, Jeux d'enfants (2004)
Folio Policier, 363 pages. Traduit de l'anglais par Isabelle Maillet. 
Titre en V.O. : Boy A.

En écoute : A Ribbon _ Devendra Banhart

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Commentaires
J
Bonjour, <br /> <br /> J'ai lu avec attention votre billet. Conseillerez-vous la lecture de ce livre à de jeunes adolescents (moins de 18 ans) ? Bonne continuation !
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